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Photo en musées : le numéro d’accession

23 août 2010

Identifiants au dos de la statue MR242 (Ma1274) du Louvre

L’association Wikimédia France organise le 4 septembre un atelier « photographie » destiné aux contributeurs (actuels ou potentiels) de Wikimedia Commons. J’y effectuerai un petit exposé sur les photos en musée. J’en profite pour lancer une petite série de billets sur ce thème.

J’ai déjà parlé de l’importance de décrire correctement un objet de musée quand on en publie une photo sur Commons. Je remets une couche aujourd’hui sur le numéro d’accession, également appelé numéro d’entrée, ou numéro d’inventaire, qui sert à identifier un objet, idéalement de manière unique (deux objets ne partagent pas le même numéro). Chaque institution est susceptible de posséder son propre système de numérotation et, quand elle est d’âge vénérable, en a souvent plusieurs. Au British Museum, par exemple, le numéro commence le plus souvent par l’année d’entrée dans les collections. Le relief dit de l’« apothéose d’Homère » est ainsi numéroté 1819.8-12.1 parce qu’il a été acheté en 1819 ; il est également connu sous l’identifiant Sculpture 2191, qui correspond à une ancienne numérotation.

Beaucoup des objets du musée du Louvre portent également un double identifiant, ce qui peut être source de confusion. Pour les marbres du département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (DAGER), l’un est un numéro d’entrée à proprement parler, l’autre un numéro d’usage. Le numéro d’entrée peut affecter des formes assez différentes. Les numéros en MR se rattachent à l’inventaire des Musées royaux effectué en 1816, ceux en LL au règne de Louis XVIII, ceux en CC au règne de Charles X, ceux en LP au règne de Louis-Philippe, ceux en MN (« musées nationaux ») à la Deuxième République, NIII au Second Empire, ceux en MNB aux registres 1871-1881, ceux en MNC aux registres 1881-1898, ceux en MND aux registres 1898-1967 et ceux en MNE aux registres depuis 1967. Certains identifiants commencent enfin en CA (« céramique antique ») ; on y trouve quelques objets en calcaire.

Le numéro usuel commence en Ma et renvoie au Catalogue sommaire des marbres antiques publié en 1896 par Antoine Héron de Villefosse (1845-1919), conservateur du département. C’était un guide pour la visite, décrivant brièvement les objets contenus dans chaque salle, numérotés de 1 à 3054 dans un ordre qui m’échappe. Il a été augmenté en 1922 par Étienne Michon (1865-1939), puis complété en 1963 par La Sculpture grecque et romaine au musée du Louvre de Jean Charbonneaux (1895-1969), qui porte la liste au numéro Ma 3588. Elle se poursuit encore maintenant sous la forme d’un registre manuscrit.

Hasard de l’histoire, le livre d’entrée ne mentionne pas tous les objets du DAGER, ou du moins ne le fait pas clairement : les descriptions peuvent être très sommaires, témoin cette « stèle de beau style grec, en marbre » donnée par M. Grasset en 1864. Il est ensuite très difficile d’identifier l’objet décrit parmi les collections, ce qui illustre bien l’importance de décrire précisément et donc de collecter le maximum d’informations possible pour son fichier. Pour établir son catalogue des sculptures grecques du Louvre (éditions de la RMN, 1re édition 1992), Marianne Hamiaux a dû vérifier systématiquement les numéros et retrouver les manquants. Toutes les lacunes n’ont pu être comblées, ce qui explique qu’on utilise encore maintenant la numérotation Ma qui, « de fait, est devenue le moyen d’un récolement permanent de la collection de marbres du Département » (M. Hamiaux, introduction du catalogue).

Cartel d'un objet du DAGER. Les identifiants sont en bas à droite.

Où trouver ces numéros ? Sur le cartel de description de l’objet, bien sûr. Tout musée devrait posséder des cartels bien décrits et mentionnant le ou les identifiants. Vous en trouverez un exemple sur l’illustration d’en face ; les identifiants sont en bas à droite (NDLR : la partie soumise au droit d’auteur a été floutée ; un cachou à celui qui réussit à lire quand même). Ce n’est pas toujours le cas — le Cabinet des médailles de la Bnf en est un bon exemple. Le fait qu’il n’existe, à ma connaissance, aucun catalogue récent des collections ne doit pas aider — je ne crois pas que le Guide illustré au Cabinet des médailles et antiques de la Bibliothèque nationale d’Ernest Babelon (1854-1924), qui date de 1900, ait eu un successeur.

En l’absence de cartel précis, comment retrouver vos petits ? Un ou plusieurs identifiants sont souvent inscrits directement sur l’objet — généralement au dos pour les statues, ou sous le pied pour les vases. La première photo représente le dos d’une statue romaine du musée du Louvre, représentant un nu héroïque et dite « Jules César ». Elle appartient à la collection Borghèse, achetée par Napoléon Ier en 1807 à son beau-frère le prince Camille Borghèse. Elle figure donc parmi les collections royales en 1816 et porte un numéro d’inventaire en MR, assorti d’une fleur de lys sur la statue. Héron de Villefosse la mentionne dans la salle d’Auguste — elle est exposée aujourd’hui dans la galerie Daru — sous le numéro 1274, avec la description : « Jules César, statue héroïque ; un pan de draperie jeté sur l’épaule gauche entoure l’avant-bras ; à ses pieds une cuirasse. Coll. Borg. » On voit clairement sur la photo que l’identifiant a été ajouté sur la statue après le numéro en MR.

Il arrive évidemment que l’on ne puisse ni disposer d’un cartel précis, ni trouver un identifiant sur l’objet. À l’impossible nul n’est tenu, mais je vous engage quand même à bien vérifier par vous-mêmes.

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